vendredi 21 décembre 2007

Assez de sophismes et de contre-vérités !

Avec un mélange de candeur et de mauvaise foi (chacun jugera des proportions en fonction des auteurs), l'intersyndicale des personnels (FERC-CGT, SUD), et le Comité de lutte étudiant dénoncent les « violences » dont ils sont victimes lorsqu'un barrage destiné à bloquer l'Université est levé par d'autres qu'eux-mêmes. Il y aurait là une action « illégitime » dès lors qu'elle va à l'encontre de décisions prises à la majorité dans les AG.

Cela revient à dire que tous les personnels et étudiants de l'Université sont censés se soumettre à la loi « légitime » dictée par les membres du mouvement, et qu'on leur reconnaît donc le droit de parler au nom de tous.

Répétons-le : la légitimité de l'existence d'un comité de luttes n'est contestée par personne. Mais il faut que celui-ci reconnaisse que ses décisions ne concernent que les membres du mouvement qui le soutiennent. Un appel à la participation de tous n'implique pas le droit de parler au nom de tous : n'importe quel comité peut faire la même chose et prendre des décisions de sens opposé.

Affirmer que les décisions des AG sont la source d'une loi qui s'applique à tous est une prétention exorbitante. Outre que ces décisions ne peuvent porter que sur des buts et des moyens d'action et non sur les calendriers de l'ouverture de l'Université, elles instituent une situation de non droit qui livre l'état de fait institué au seul jeu des rapports de force : le blocage est une situation illégale qui perdure aussi longtemps que ceux qui l'imposent ont assez de force pour le maintenir. Et cette force, comme on l'a vu à deux occasions ces derniers jours, peut être inférieure à celle de ses adversaires.

On est donc malvenu à s'autoriser d'une quelconque légitimité (en l'occurrence celle de décisions votées à la majorité dans les AG dès lors qu'elles outrepassent leur domaine de compétence) pour condamner les « débloqueurs » et, plus encore, à demander que les blocages soient respectés sur le mode de la légalité : le seul droit qui vaut est le droit commun, qui concerne aussi la gestion de l'Université. Et, par rapport à ce droit, le blocage est illégal.

Il est assurément déplorable que, dans le cadre d'une université, le dernier mot revienne à la force. Les personnels et étudiants qui ont imposé l'ouverture des locaux les jeudi 13 et mercredi 19 décembre derniers sont les premiers à le déplorer. Mais en l'absence de tout recours aux forces publiques, seules à même de rétablir la légalité par l'usage d'une violence physique légitime, il n'y a d'autre issue que ces bousculades dans lesquelles, heureusement, les parties en présence évitent d'en venir aux coups.

Ajoutons enfin que si la force des uns cède devant celle des autres dans un sens inconnu jusqu'ici à l'UTM, c'est que les partisans du blocage sont actuellement minoritaires : qu'ils le reconnaissent enfin et admettent, face à cette évidence, qu'ils parlent bien en leur seul nom, pas au nom de tous.

mercredi 19 décembre 2007

La validation : une question de crédibilité !

Intervention du collectif « Université et démocratie » devant le Conseil d’Administration du 19 décembre 2007

Le collectif Université et démocratie, né d’un sentiment d’exaspération devant l’institutionnalisation des blocages à l’université du Mirail, regroupe aujourd’hui une centaine de membres, principalement mais pas exclusivement enseignants. Leur mobilisation, spontanée, forte et constante, a permis de mener, dans la paix et la détermination, différentes actions et réflexions.
Depuis le début de la crise actuelle, nous nous sommes prononcés contre tout blocage et avons rappelé que l’université a pour vocation d’être un lieu de libre expression, de libre circulation, de libre accès au savoir, c’est-à-dire aux cours et aux bibliothèques. Gérée par des assemblées librement élues et légitimées par ce mode de désignation, l’université doit reposer sur le principe de démocratie. Par conséquent, nous considérons que les AG n’ont pas à dicter les périodes d’ouverture et de fermeture ni à imposer leurs décisions à plusieurs milliers d’étudiants, enseignants et personnels IATOS. Dans l’espoir de sortir de la suite infernale des blocages et de recréer un véritable espace de débat au sein des universités, nous avons entrepris de rédiger un texte de propositions touchant au fonctionnement de notre institution et à sa vie démocratique, afin de le livrer prochainement à la réflexion des différents acteurs de la vie universitaire. Il est urgent de trouver les conditions favorables à l’émergence de nouveaux modes d’action qui échappent à la série des blocages : d’autres moyens doivent permettre à ceux qui le souhaitent de se mobiliser pour défendre leurs opinions et faire valoir leur point de vue.

Pour l’heure et puisque nous voulons croire que l’UTM va en finir avec le blocage, au moment où le CEVU s’est prononcé sur un scénario pédagogique qui nous semble à certains égards problématique et tandis que le Conseil d’Administration s’apprête à trancher sur cette question, il nous paraît essentiel d’insister sur divers enjeux majeurs de la procédure de sortie de crise et d’appeler les responsables de l’université du Mirail à la vigilance, à la fermeté et à l’action.

Les bloqueurs ont, à plusieurs reprises, rassuré la masse des étudiants sur le fait que perdre cinq semaines de cours, voire sept, dans le cadre de semestres qui en comportent douze, n’aura aucune incidence sur les diplômes délivrés par l’université. Les orateurs des AG ont prétendu que l’administration et les enseignants organiseraient un rattrapage des cours et mettraient en place toutes les modalités nécessaires pour la validation du semestre et des diplômes, oubliant que les diplômes doivent en vérité valider des contenus. Il est vrai que, par le passé, nous avons toujours tout validé sans guère nous soucier des contenus ni de la valeur reconnue à l’extérieur de l’UTM à des titres qui sonnent de plus en plus creux. En toute bonne foi sans doute, pour sauvegarder les intérêts de nos étudiants, nous avons accepté, de blocage en blocage, de fermer les yeux et de transformer une fiction pédagogique en réalité diplômante.

L’effet pervers de cette générosité, contre-productive, est qu’elle fait de l’administration et des enseignants les alliés objectifs des bloqueurs. Ainsi, la pratique du blocage s’est-elle enracinée, durant les dix ou quinze dernières années, avec pour conséquence une dégradation continue de nos enseignements et de nos diplômes. Il faut y mettre un terme. Au moment où tant de périls fragilisent l’université publique, il est de notre devoir de lutter contre ceux qui dérivent de nos propres pratiques et d’envoyer à nos étudiants un signal fort, dont nous savons qu’il va demander à chacun, enseignants et étudiants, de faire preuve de courage.

En conséquence, nous ne pouvons légitimement, pour des raisons de cohérence, de dignité et de sérieux, accepter que le contenu des enseignements du premier semestre soit allégé au moment de la validation. La prolongation du premier semestre jusqu’à la semaine du 21 janvier incluse doit être vue comme la garantie de la préservation de l’intégralité du programme annoncé à la rentrée d’octobre. Nous considérons aussi comme primordial que le calendrier du second semestre reste inchangé, et ne soit pas amputé de deux semaines, comme certains scénarios le prévoient. Il est urgent, en effet, de défendre la valeur des cours assurés en présentiel, plutôt que de sacrifier, sans autre forme de procès, les semaines finales du second semestre. Il faut, coûte que coûte, garder à l’esprit que les diplômes délivrés n’ont de valeur que s’ils évaluent de réels savoirs et savoir-faire. Nous exprimons notre inquiétude profonde face à tout autre solution qui représenterait une issue choquante.

Ces convictions et ces propositions demandent à tous, nous en sommes conscients, du courage et un réel sens des responsabilités. Le redressement de notre université, une fois de plus gravement affectée par cinq semaines de blocage, mérite cet effort collectif. Nous adressons donc un appel solennel au Président de l’université et au Conseil d’Administration afin qu’ils prennent en compte la voix de plus en plus massive des enseignants qui ne sont plus disposés à accepter n’importe quelle solution de compromis et entendent défendre la dignité de leur mission pédagogique et scientifique.

lundi 17 décembre 2007

Appel à une présence massive et pacifique des enseignants, du personnel administratif et des étudiants sur le campus du Mirail le 19/12/07

Une AG d'étudiants a voté une nouvelle fois la mise en place de «piquets durs», c'est-à-dire d'un blocage pur et simple, pour le mercredi 19 décembre au matin. À trois jours de la dispersion pour les vacances de fin d'année, nous ne pouvons voir dans ce geste que la volonté de mettre à terre un semestre déjà sévèrement compromis, avec des risques grandissants pour les étudiants.

Pas plus que jeudi dernier ou lors des épisodes précédents, nous ne reconnaissons de légitimité aux décisions de cette AG. Nous sommes déterminés à ne pas laisser démanteler nos enseignements et notre université publique ; le seul résultat de telles actions serait, à moyen et même à court terme, d'affaiblir notre capacité à accueillir les étudiants les plus motivés et de renforcer des offres concurrentes en provenance d'institutions privées qui pourront imposer des frais d'inscription d'autant plus élevés que les blocages récurrents auront cassé l'image et l'attractivité de l'université publique.

Nous demandons donc à la présidence de l'UTM de prendre toutes les dispositions pour éviter la mise en place d'un nouveau blocage. Et pour ce qui nous concerne, nous invitons l'ensemble des collègues, des personnels et surtout des étudiants de l'UTM à rejoindre l'université mercredi matin dès 7h30, pour y affirmer dans le souci du dialogue, dans la paix et aussi dans la détermination la plus ferme, leur volonté d'enseigner et d'étudier. Une AG qui ne représente qu'elle-même ne saurait fixer de manière unilatérale le calendrier de centaines d'enseignants, de personnels IATOS et de deux dizaines de milliers d'étudiants. L'ensemble des activités prévues mercredi doivent se dérouler normalement.

Nous sommes par ailleurs également déterminés à continuer de débattre de la loi LRU et des autres réformes annoncées pour l'Université, à user pleinement de notre droit critique à l'égard du système existant et de ce que l'on veut y substituer mais à des heures et selon des modalités qui permettent aussi de remplir nos missions d'enseignement et de formation, dans une université ouverte, libre et responsable.

Rendez-vous, en masse, sur le campus mercredi 19 décembre dès 7h 30.

mercredi 12 décembre 2007

Appel à une présence massive et pacifique sur le campus du Mirail jeudi matin 13 décembre, à 7h45

Une AG d'étudiants a voté ce mardi 11 décembre la mise en place de « piquets durs » pour jeudi 13 décembre. L'histoire récente du Mirail laisse redouter une prolongation de ce nouveau blocage. Ainsi les activités de l'ensemble de l'université du Mirail sont-elles rythmées ou plus souvent figées, depuis fin octobre, par les décisions d'une AG dont les statuts de l'université ne connaissent pourtant pas l'existence. La légalité républicaine n'a plus cours sur le campus, le sens du mot démocratie a été miné, des milliers d'étudiants sont à nouveau privés d'enseignement.

L'université est allée suffisamment loin dans la voie de la conciliation et du compromis, et poursuivre dans ce sens serait se résoudre à l'abandon et à l'humiliation. Les premières victimes n'en sont pas les salariés de l'université, toutes corporations confondues, mais ses étudiants, du service desquels nous tirons tous notre légitimité. Nous ne pouvons plus les abandonner soit à une AG dont le bureau, l'ordre du jour, les questions soumises au vote, sont composés de manière parfaitement unilatérale, soit à leur solitude, à leur incompréhension et à un découragement dont des signes de plus en plus nombreux montent vers nous. Nous ne pouvons plus nous en tenir à la dénonciation vertueuse du blocage. Nous demandons solennellement au président Daniel Filâtre de prendre toutes dispositions pour assurer le libre accès aux cours des enseignants et des étudiants ce jeudi.

Membres du collectif Université et démocratie, nous considérons pour notre part que déserter plus longtemps le campus serait trahir notre mission. Aussi appelons-nous les collègues, les personnels IATOS, et l'ensemble des étudiants, à se rendre massivement et pacifiquement jeudi matin dans les locaux de l'université pour la faire vivre et y tenir les activités normalement prévues. Il y va, pour nos étudiants, de ce qui peut encore être sauvé de ce premier semestre.

Nous sommes déterminés à ne plus laisser confisquer ce fragile mais précieux instrument de travail, de culture et de promotion que doit rester notre université. C'est cette détermination que nous appelons à manifester demain jeudi 13 décembre dès 7 h 45 dans le patio de l'université par une présence massive, dans le respect de chacun et dans le souci de la concorde.

lundi 10 décembre 2007

Nos propositions pour la validation du semestre et pour une «Charte de la Démocratie Universitaire»

Le Collectif « Université et Démocratie » s'est efforcé, depuis le début du blocage, d'être la voix d'enseignants qui se sentent interpellés et préoccupés par la réforme LRU, mais qui considèrent le blocage de l'université comme un acte de violence à l'encontre des biens et des personnes, comme une contrainte inadmissible et un obstacle au débat démocratique.

Né de manière spontanée, le Collectif regroupe actuellement près de 80 personnes, provenant de nombreux départements et disciplines qui échangent librement leurs opinions et tentent de faire des propositions constructives pour défendre une université - la nôtre d'abord, mais aussi l'université en général - en état de fonctionnement, remplissant ses missions d'enseignement et de recherche, défendant son renom et affichant des ambitions.

Depuis jeudi, l'UTM est enfin redevenue un espace libre. Les dommages matériels, pédagogiques, scientifiques et en termes d'image causés par le blocage sont énormes et nous le déplorons vivement. Il nous semble impératif de ne pas éluder le bilan des responsabilités. Nous réclamons le respect du droit et de la loi sur le campus par tous ceux qui le fréquentent. Nous exprimons aussi vigoureusement le vœu qu'une prochaine AG des étudiants ne se croie pas autorisée à paralyser de nouveau les activités, en profitant du fait que les étudiants, soucieux de ne plus perdre de cours, n'y participent pas massivement. Il est urgent de sortir de la logique d'une fausse représentativité qui a atteint, avec cette crise, des limites inacceptables puisqu'elle met en cause le fonctionnement même de l'institution universitaire.

Nous souhaitons prendre position clairement sur la question du rattrapage des cours, en nous déclarant fermement opposés, comme nous l'avons été depuis le début, à toute forme de rattrapage et à toute modification du calendrier. Nous demandons aussi que la validation du semestre porte sur le programme annoncé en début d'année ; chaque enseignant veillera à donner aux étudiants les moyens utiles pour atteindre cet objectif. Par cette position, nous entendons éviter de cautionner et d'encourager les blocages, en garantissant, comme on l'a fait par le passé, à chaque sortie de crise, une sorte de « filet de sécurité » qui déresponsabilise tant les bloqueurs, que les étudiants de la « majorité silencieuse ». Nous sommes aussi soucieux de ne pas dévaloriser nos formations et nos diplômes. Nous refusons donc toute forme de braderie des examens.

Nous appelons de nos vœux la mise en place rapide de débats sur la loi LRU au sein de notre communauté universitaire, afin que la réforme en cours soit l'objet d'une information approfondie, d'un débat contradictoire, d'une saine et forte mobilisation pour la défense démocratique des valeurs culturelles et scientifiques qu'incarne l'université.

Enfin, constatant à la lumière des événements des cinq dernières semaines à quel point les dysfonctionnements au sein de la communauté universitaire (blocage, tensions, dégradations...), au Mirail certes, mais aussi partout en France, sont graves et lourds de conséquences, nous désirons lancer une réflexion sur l'élaboration de nouveaux modes de débat public et mobilisation citoyenne au sein des universités, sur un fonctionnement plus démocratique, plus clairement légitimé, plus participatif, en accord avec le respect des biens, le droit des personnes et du travail. Après en avoir discuté avec tous ceux que cela intéresse, nous proposerons une «Charte de la Démocratie Universitaire», qui consisterait en un code de bonne conduite de la concertation démocratique dans l'université. Ce document engagerait toutes les parties concernées sur des règles de fonctionnement simples et clairement affichées, prévoyant les droits et les devoirs de chacun, ainsi que les sanctions en cas de non respect de cet engagement.

Élaborée à Toulouse, où la culture du blocage a atteint des limites intolérables, une telle Charte aurait vocation à être soumise à d'autres universités pour relancer les initiatives d'une communauté universitaire déboussolée et malmenée un peu partout, prise entre le marteau des réformes brutales du gouvernement et l'enclume des blocages.